EDF pourra demander une indemnisation en cas de fermeture de réacteurs nucléaires

Le Conseil constitutionnel, qui a rendu son avis sur la loi de transition énergétique, estime qu’elle n’empêche en rien l’électricien de demander réparation à l’État pour préjudice subi. Une facture potentiellement très lourde pour les finances publiques.

La fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim pourrait coûter très cher aux finances publiques. Le Conseil constitutionnel vient en effet de confirmer, dans sa décision sur la loi de transition énergétique, qu’EDF pourra bien «prétendre à une indemnisation pour préjudice subi» en cas de fermeture d’un ou plusieurs réacteurs nucléaires. Pour les Sages, la loi qui prévoit de plafonner la capacité de production du parc nucléaire français n’y fait en effet pas obstacle. Un amendement, déposé lors de la lecture du texte au Sénat et prévoyant explicitement cette possibilité, avait pourtant été retiré lors de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

Adoptée le 22 juillet dernier, la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte instaure un objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité française, de 75% à 50% en 2025, et plafonne pour ce faire la capacité du parc à 63,2 gigawatts au total. Au-delà, aucune autorisation d’exploiter une installation ne sera accordée. Mais avec l’entrée en service de l’EPR de Flamanvilleprévue au deuxième semestre 2017, ce plafond sera dépassé à moins que le gouvernement ne ferme plusieurs réacteurs. La centrale de Fessenheim, que François Hollande s’était engagé à fermer pendant la campagne présidentielle, est évidemment la première sur les rangs. En avril encore, le chef de l’État a confirmé qu’il prévoyait la fermeture de la doyenne des centrales nucléaires françaises «à l’horizon de la fin du quinquennat».

EDF pourrait dans ce cas se retourner contre l’Etat et lui demander de le dédommager. L’affaire est potentiellement ruineuse. Si le Conseil constitutionnel ne chiffre pas le montant que l’électricien français pourrait exiger, un rapport du député socialiste Marc Goua et du député Les Républicains Hervé Mariton avait évalué en septembre dernier la facture à quelque 4 milliards d’euros pour la seule fermeture de Fessenheim. Pour parvenir à ce chiffre, les parlementaires n’avaient pas pris en compte le montant total du manque à gagner subi par EDF jusqu’en 2040 – la prolongation de l’exploitation à cet horizon n’est en effet pas certaine – mais seulement 85% de ce montant. Le chiffre de 85% correspondant à la probabilité, évaluée par les députés, que Fessenheim obtienne l’autorisation d’exploitation de la centrale jusqu’en 2040. Ce «chiffre assez haut mais hautement crédible» selon les députés, a été jugé «farfelu» par Ségolène Royal.

L’électricien ne s’est lui-même pas encore prononcé sur la question. PDG de l’entreprise lors des auditions, Henri Proglio avait jugé «logique que l’entreprise sollicite une indemnisation», dans la mesure où la fermeture de Fessenheim ne résulterait pas d’une décision de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), prise pour des raisons de sécurité, mais d’une loi. «Une telle démarche est aussi naturelle que nécessaire, compte tenu des responsabilités de l’entreprise vis-à-vis de ses actionnaires, avait-il expliqué. L’indemnisation devra être juste et précise. Elle fera l’objet d’une évaluation qui n’a pas encore été arrêtée mais qui sera transmise, en temps voulu, pour analyse contradictoire, voire pour arbitrage». L’ex-PDG avait précisé que cette évaluation serait réalisée après le vote de la loi. Le gouvernement devrait bientôt avoir une idée plus précise de la facture.

source : http://www.lefigaro.fr/societes/2015/08/17/20005-20150817ARTFIG00093-edf-pourra-demander-une-indemnisation-en-cas-de-fermeture-de-reacteurs-nucleaires.php

Comments are closed.