Des pêcheurs en colère ont manifesté sur la plage.

En marge de la dernière réunion publique du 28 juillet, des patrons marins pêcheurs ont fait entendre sur la plage leur farouche opposition à coup de banderoles et de fumigènes. Pendant ce temps, Étienne Baland, président de la commission particulière de débat public – qui donnera ses conclusions en septembre avant que le maître d’oeuvre ne se prononce en décembre – tirait un bilan plutôt positif du débat public qui s’est achevé le 31 juillet.

Bilan positif

Le projet prévoit l’installation de 62 éoliennes Aden d’une puissance unitaire de 8 MW sur une surface de 91,5 km 2 pour une puissance totale de 496 MW. Elles permettaient de couvrir la consommation électrique annuelle de 850 000 personnes. Le coup d’investissement du projet est estimé à 2 milliards d’euros. Il est porté par Engie, EDP renewables, Neoen marine et Adwen. L’exploitation est prévue pour 2021 et le démantèlement pour 2041. Il se trouverait à 16 km au large de Dieppe, 15 du Tréport et 19 de Cayeux-sur-Mer. « Le bilan est relativement positif, estime Étienne Baland. Nous avons pu débattre en profondeur du sujet. Il est controversé mais le citoyen qui voulait se faire un avis a pu avoir accès à toutes les informations. Les pêcheurs disent non à ce projet, ils sont constants mais ont toutefois fait l’effort de réfléchir et de proposer une solution alternative. Ils souhaiteraient que le parc offshore soit implanté à l’ouest du chenal de Dieppe. » Les professionnels de la pêche qui stationnent dans le port du Tréport, dont certains sont Picards, redoutent la disparition d’une zone exceptionnellement riche. Pas moins de 1 000 emplois directs et indirects seraient touchés dans les secteurs de la pêche mais aussi du tourisme. Olivier Becquet, du comité régional des pêches et gérant de la coopérative de pêche du Tréport, a donc proposé une zone alternative. Elle est moins riche en poisson et donc moins fréquentée par les bateaux, mais reste pour les professionnels un sacrifice.

Aux USA, ils appellent ça le syndrome NIMBY, c’est à dire Not-in-my-Backyard, ou « pas dans mon jardin » : le fait que les gens (nous) ne veulent pas voir de nouveaux équipements, même utiles au bien public, s’installer près de chez eux. Ce syndrome du « pas chez moi » touche particulièrement les éoliennes : trop bruyantes disent les uns, disgracieuses et néfastes à la vue disent les autres

Annulation de l’appel d’offres ?

L’actuelle zone a été déterminée par le gouvernement. En cas de changement, l’appel d’offres devrait être annulé ce qui entraînerait des frais. Il faudrait dix ans d’études en plus. La France serait en retard sur son programme prévoyant 40% de production d’énergies renouvelables en 2030 : « Il n’y a eu aucune concertation, raconte Olivier Becquet, qui prévoit des actions musclées si la situation n’évolue pas. On a tout simplement l’impression de parler à un mur. Durant le débat public, certains, qui étaient pour la transition énergétique et le parc, ont compris que nous étions en danger et nous soutiennent. »

Du côté politique, les élus locaux sont farouchement opposés au projet mais pas par exemple les conseils régionaux de Picardie et de Haute Normandie : « Nous ne céderons pas face à l’État », a martelé, devant une salle de 250 personnes chauffée à bloc, Emmanuel Maquet, maire de Mers-les-Bains, vice-président du conseil départemental en charge de l’économie et président du syndicat mixte baie de Somme. Des décideurs l’attendent avec impatience comme Dominique Garçonnet, président de la chambre de commerce et d’industrie de Dieppe. Il a défendu le pôle méca-énergie qui regroupe 120 entreprises (8 500 emplois).

Car le projet va occuper 125 personnes en maintenance localement durant 20 ans et créer plus de 750 postes sur Le Havre et Rouen (Seine-Maritime) lors de la phase de construction des éoliennes. « C’est vous qui allez avoir les emplois. Alors, prenez les éoliennes », a fustigé un opposant dans la salle. Reste toutefois à l’issue de ces 100 jours de nombreuses interrogations comme le prix du rachat du MWH, les répercussions sur les animaux marins (mort, départ…) lors des travaux de fondations (monopieux, graviter ou jacket à quatre pieds), le temps de production d’électricité par les éoliennes, la possibilité pour les pêcheurs de naviguer ou pas dans le parc… et ce même si Raphaël Tilot, de la société des éoliennes en mer, parle « d’excellence du projet ».

 

Source : Isabelle Boidanghein

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